Diaconat féminin : simple cheval de Troie de l’inégalité homme-femme dans l’Eglise Catholique ?

Le diacre est défini clairement par la conférence des évéques de France comme « un homme célibataire ou marié qui exerce […] après un temps de discernement et de formation (partagé avec son épouse si ce dernier est marié)[…] un ministère au service de la Charité, de la liturgie et de la Parole de Dieu. »
Jusqu’au XIIe siècle ce titre était indistinctement proposé aux hommes et aux femmes en fonction de leurs dons à remplir leur mission. Tombée dans l’oubli durant presque 800 ans, la question du diaconat féminin fait l’objet de nombreuses réflexions depuis l’institution en 1964 de diacres permanents et son ouverture en 1967 aux hommes mariés.
Outre la question de la reconnaissance c’est celle de la place des femmes dans l’institution qui pose débat et avec elle, celle de l’égalité entre les baptisés. Ce synode « le plus féminin de toute l’histoire » aura donné le droit de vote aux femmes (enfin !) mais n’aura cependant pas retenu la question du diaconat. Aujourd’hui, comme en 1971 – et alors que les demandes ne cessent d’affluer de la part des Églises européennes mais aussi latino-américaines – le sujet a été écarté des thématiques abordées.
Qu’en est-il alors de la commission d’étude sur le sujet entamée par le pape François en 2016, puis relancée en 2020 ? Simple cheval de Troie ? Pourquoi la reconnaissance d’un service qui, disons le clairement, est déjà en grande partie exercé par des femmes bloque-t-il à ce point ?
Et à Anne-Marie Pelletier d’ajouter « Comment faire entendre que c’est la vie de l’Église à sa pleine dimension, masculine et féminine, qui est en jeu ? Comment faire comprendre qu’il ne s’agit pas de pouvoir ni même de reconnaissance, mais fondamentalement de la mission de l’Église, en permettant que la grâce de la vie du Christ puisse rejoindre le monde […]. »
La contradiction du pape François est d’autant plus grande qu’il opposait, en avril dernier, un « non » péremptoire à la possible ordination diaconale des femmes lors d’une interview à la chaîne CBS – et ce avant même que le travail sur la synodalité ne soit terminé. « Les femmes ont toujours eu la fonction de diaconesses sans être diacres », finit par lâcher le pape en fin d’interview. Que doit-on en penser ? Que les femmes continuent de servir, éduquer, entretenir, partager la parole sans faire de vague ? Doit-on se satisfaire de cet état de fait ? Est-ce une inégalité humainement et théologiquement acceptable ?
Le comité de la Jupe et 29 autres associations catholiques et féministes à travers le monde ont lancé un mouvement de contestation intitulé Pourquoi pas moi ? Elles interrogent et critiquent ces contradictions théologiques. Toutes les femmes sont appelées dans la suite de Marie et Marie Madeleine – comme tous les baptisés – à être apôtre.
Dans un monde en crise nous ne sommes jamais de trop pour annoncer la bonne nouvelle – peu importe notre sexe.
Dans une institution en crise, rappelons-nous qu’il est plus simple d’avancer en marchant sur deux jambes (féminin et masculin) qu’en essayant de sauter sur une. Ne nous contentons plus de grands principes théoriques tels que « renforcer l’accès aux femmes à des postes de responsabilité ». Faisons entendre notre voix et espérons, à la suite de Anne Marie Pelletier, « qu’il y ait du côté de la vie chrétienne au féminin, du vin nouveau qui finira par faire éclater les vieilles outres. »
Alice B.
Tableau en couverture : La conversion de Marie-Madeleine, Véronèse (1547)